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qui est bon pour Hollywood et l'industrie pharmaceutique américaine
n'est pas bon pour toute la planète. C'est au nom de ce principe qu'un
groupe de pays en développement, Brésil et Argentine en tête, vient
d'ouvrir un nouveau front dans les négociations internationales en
demandant une réforme des politiques dans le domaine de la propriété
intellectuelle. Objectif : alléger les contraintes qui pèsent sur les
pays du Sud en matière de brevets ou de droits d'auteur afin de leur
permettre de copier certaines technologies du Nord et d'accéder plus
facilement à l'information. La proposition sera discutée à partir du 27
septembre lors de l'assemblée générale de l'Organisation mondiale de la
propriété intellectuelle (Ompi), agence spécialisée des Nations unies
(lire ci-contre). «Le rôle de l'Ompi ne doit pas être limité à la
promotion de la propriété intellectuelle. L'organisation doit inscrire
le développement dans ses missions», a déclaré mardi dernier Marta
Gabrieloni, de la mission permanente de l'Argentine auprès de l'ONU,
lors d'un colloque sur l'Ompi organisé à Genève par la fédération
d'associations de consommateurs Transatlantic Consumer Dialogue.
«Sujet chaud». En
ligne de mire, les pressions des pays du Nord pour aligner via des
traités, le régime des brevets ou des droits d'auteur des pays du Sud
sur celui en vigueur chez eux. «Les Etats-Unis voient l'OMPI comme
un outil de politique commerciale: ils s'en servent pour promouvoir
leurs industries les plus compétitives», souligne le Kényan Sisule
Musungu, consultant de l'ONG South Centre. Autrement dit : c'est pour
ouvrir de nouveaux marchés à leurs industries culturelles qu'ils
poussent pour un haut niveau de protection du copyright, tout comme la
promotion des brevets vise à assurer des débouchés aux firmes les plus
en pointe dans le domaine technologique.
«C'est un sujet chaud qui a vraiment démarré avec le débat sur l'accès aux médicaments»,
poursuit Sisule Musungu. En novembre 2001, à Doha, les pays développés
ont dû concéder aux pays du Sud le droit de copier des médicaments
encore sous brevets en cas d'urgence sanitaire. La proposition du
Brésil et de l'Argentine vise à étendre ce principe. «Un niveau
trop élevé de protection peut empêcher les pays sous-développés de se
procurer des médicaments à bas prix, mais limite aussi la création
d'industries locales», explique le Malais Martin Khor, de l'ONG
Third World Network. Même critique lorsque le droit d'auteur empêche la
copie à bas prix de livres scolaires ou scientifiques. «Le livre l'Avantage concurrentiel des nations de Michael Porter est vendu 45 dollars en Thaïlande et 40 dollars aux Etats-Unis, ironise le Malais Sothi Rachagan, de l'association Consumers International. Rapporté
aux niveaux de vie, c'est comme si ce livre était vendu 300 dollars aux
Etats-Unis : si c'était le cas, cela fait bien longtemps que les
Américains auraient modifié leur législation.»
Les promoteurs
d'une réforme de l'OMPI soulignent l'hypocrisie des pays aujourd'hui
développés, dont bon nombre ont fait preuve de souplesse en matière de
propriété intellectuelle lorsque cela servait leurs propres objectifs
de développement. C'est le cas des Etats-Unis, qui ont refusé
d'accorder un copyright aux livres étrangers jusqu'en 1891 : les
oeuvres britanniques, majoritaires à l'époque, pouvaient être copiées
sans entrave, procurant des revenus faciles aux éditeurs américains. De
même, la Corée du Sud et Taiwan ont refusé d'accepter la plupart des
brevets étrangers pendant leur décollage économique, dans les années 60
à 80, afin de soutenir une industrie locale fondée sur l'imitation.
«Première étape». «Pas
mal de pays en développement feraient mieux de consacrer plus d'argent
à l'éducation et moins à l'armement avant de vouloir copier», estime
un représentant du gouvernement américain. Même agacement pour Rogier
Wezenbeek, de la Commission européenne, qui assure que «les traités contiennent assez de flexibilités pour les pays qui en ont besoin». La mise en débat du sujet n'est qu'une «première étape»,
relativise Martin Khor. Un large consensus sera nécessaire pour
modifier le mandat de l'OMPI, ce qui, selon un cadre de l'organisation, «pourrait prendre des années».